Silence, on roule !

J’ai une question à vous soumettre…
Oh, toute simple : pas de cosmologie, cette fois. Peut-être plutôt de la sociologie… 😉

J’ai découvert cet après-midi un idéogramme inattendu.

Le silence est d'or !

Me rendant par voie ferroviaire d’Amsterdam à Groningen – aux Pays-Bas, donc –, j’ai dû changer de train quelque part entre les deux, à Amersfoort. Au cours de la première partie du voyage, j’étais assis derrière un anglais et une anglaise, probablement collègues de travail, dans le plus pur style british. Distinction exemplaire, courtoisie inégalable, articulation parfaite, intonations impeccables… comme sur une cassette de méthode linguistique ! Notre gentleman faisait peut-être un usage quelque peu excessif de ce qui semblait chez lui être un pilier majeur de l’art de la conversation : l’étonnement !

Devant tant de civilité, je n’ai pas eu l’inélégance d’écouter ce qu’ils se disaient, mais on eût pu penser qu’une véritable révolution se déroulait dans l’esprit de mon sémillant compagnon de voyage. Je pense qu’il a été surpris trois fois par minutes pendant pratiquement 45 minutes. Mais pas de « Ah bon ? Pas possible ! », ni de « C’est pas vrai ! », « Sans blague ! », « Non, j’te crois pas ! ». Nenni. Simplement quelques « Oh, really ? » bien appuyés, des « Oh, I see… » bien cadencés, ou des « Oh, really, is it ? » bien arpégés…

Mais je m’égare. Toujours est-il que, distingué ou non, un fond sonore, léger mais lancinant, avait insensiblement envahi mon espace de réflexion. Pas de quoi s’alarmer, cependant. On ne va tout de même pas devenir un vieux schnock ! Il suffit d’accroître un peu sa concentration, et le voyage continue…

À Amersfoort, donc, je change de train… et mes compagnons de voyages aussi ! Même wagon, mais cette fois deux sièges derrière le mien ! Et c’est reparti pour un flot ininterrompu de paroles et d’intonations (je me demande d’ailleurs si, parfois, l’intonation seule ne tient pas lieu de parole – s’il y a un anglais dans la salle, son avis m’interresse ! 😉 ). Je n’y prêtais déjà plus attention depuis cinq minutes au moins lorsqu’un autre voyageur, tout aussi courtoisement, explique à nos deux amis qu’ils sont dans un wagon silencieux, et qu’ils ne peuvent donc pas parler. Levant l’oreille de mon cahier (si je puis dire), je l’entends dire alors que vraiment, dans ce wagon, c’est spécial, pas de musique, pas de téléphone, pas de discussions ! Un instant, je me suis dit : « il est très fort, ce type : il voit qu’ils ne sont pas du coin, et il y va au bluff ! ». Mais très vite j’entends qu’il leur montre de petits signes au-dessus de chaque fenêtre. Je lève alors les yeux au-dessus de la mienne. Deux signes, en effet : un téléphone barré de rouge, et un index devant la bouche d’un visage stylisé, qui semble dire gentiment « chut ! ».

Silence, on roule !

Les deux anglais s’excusent alors, disant qu’ils ne savaient pas. L’autre dit non, non, je vous en prie, je suis désolé. Pas du tout, au contraire, toutes nos excuses. Merci. Merci à vous. Bon voyage. Et sur ce les deux voyageurs se lèvent et vont poursuivre leur conversation dans un wagon approprié.

Première réaction, un peu idiote (comme un réflexe) : « eh ben dites donc, ça rigole pas aux Pays-Bas ! »

Mais très vite, dès que la porte se referme en bout de compartiment, je suis comme envahi par le délice du silence ! Un silence relatif, certes – nous sommes tout de même dans un train ! – mais le simple fait de ne pas avoir à lutter inconsciemment contre la conversation d’autres voyageurs procure un appréciable sentiment d’aise. Je l’accueille comme un repos.

Alors, voilà ma question : qu’en pensez-vous ? Faut-il généraliser l’usage de ces « wagons sans parole » ?

Tout de suite après la première, ma deuxième réaction a été : « aie aie aie, si on est obligé d’imposer le silence par la loi pour voyager un peu tranquille, c’est que la société va bien mal ! D’un côté, il faut que nous soyons devenus de sacrés vieux acariâtres pour ne pas supporter la moindre conversation ! De l’autre, il doit décidemment nous rester bien peu de sens civique pour qu’il ne nous vienne pas à l’idée spontanément de ne pas empoisonner nos voisins de nos vains bavardages ! ». Je m’apprêtais donc à répondre « non » à la question posée.

Seulement voilà – et c’est ce qui m’a intéressé dans cette « expérience » : les deux compagnons de voyages n’avaient pas du tout le profil du fauteur de trouble et d’incivilité. De fait, leur discussion était plutôt discrète (rien à voir avec ces inévitables téléphoneux du RER qui racontent au wagon entier le détail de leur emploi du temps de la journée, se donnent bruyamment le beau rôle dans toutes sortes de situations insignifiantes – quand ce n’est pas carrément un auto-certificat de sainteté œcuménique -, ou décrivent par le menu je ne sais quelle intervention chirurgicale subie par leur belle sœur – une horreur !).

Mais aussi discrète et courtoise fût-elle, il faut bien reconnaître que cette conversation ininterrompue était une gêne latente pour l’entourage. Tout à fait supportable, bien sûr (et à vrai dire, il ne me serait jamais venu à l’idée qu’on pouvait s’en plaindre), mais gênante malgré tout (car il n’est pas douteux qu’elle allait se poursuivre encore une heure pleine, jusqu’à Groningen). Alors voilà. Peut-être n’est-il pas si idiot, finalement, de réserver un wagon pour ceux qui souhaitent lire, travailler, dormir, ou apprécier le paysage en silence, en permettant aux autres de discuter ailleurs. Le silence serait alors un luxe que chacun peut s’offrir, suivant son humeur du moment.

Il ne s’agit pas – j’espère ! – de faire la chasse aux joyeux compagnons épris de conversation et généreux en amabilités orales, ni d’interdire de temps à autre quelques échanges courtois, même entre voyageurs du silence. Mais tout comme on ne saurait renoncer au charme – que dis-je, à la splendeur inimitable ! – de ces vastes bibliothèques où le bois longuement travaillé par les ans résonne chaque jour un peu plus des maints échos superposés de plusieurs siècles de silence, ces wagons sans parole (et sans portable !) mériteraient peut-être de faire leur apparition dans le paysage ferroviaire français… 😉

Bon, sinon, on le savait déjà, mais… les Pays-Bas, c’est plat !

Non, je veux dire, vraiment plat ! Gare à l’augmentation du niveau de la mer…

C’est étrange, d’ailleurs, de se dire qu’on ne doit constamment d’avoir les pieds au sec qu’à quelques digues à l’avenir énigmatique, quoi qu’on en dise. Je vous écris en ce moment même, d’en dessous du niveau de la mer !

Alors, glou.., à bient… Glou glou glou

ET

Question à Stephen Hawking

Le temps, l’origine, la cosmologie…

Dans le billet précédent, je m’interrogeais un peu sur ce que peut être un questionnement capital, ou fondamental, et sur les différences qui existent entre les centres d’intérêt majeurs des uns et des autres. De fait, ce qui est très important pour certains peut paraître futile à d’autres.

Une question notoirement capitale – historiquement capitale, pourrait-on dire – est la question des origines. Mais ce qu’on entend par origine peut être très variable ! D’une civilisation à l’autre, d’une époque à l’autre, la cosmogonie revêt des formes très diverses, un mythe chassant l’autre, une représentation faisant place à la suivante, un cadre général remplaçant le précédent, ou s’y surimposant, ou coexistant avec lui…

Pour ceux que ça intéresserait, je signale un “événement” qui aura lieu le vendredi 5 mai (pour la communauté scientifique) et le samedi 6 mai (pour le grand public, comme on dit un peu bêtement). Il s’agit de l’inauguration du laboratoire APC, de l’université Denis Diderot (Paris 7) et du CNRS. « APC » veut dire « AstroParticules et Cosmologie ». Le terme « astroparticules » désigne une discipline charnière entre l’astrophysique (notamment l’astrophysique des hautes énergies) et la physique des particules (en gros, c’est dans ce domaine très ouvert et pluridisciplinaire que se situent l’essentiel de mes recherches). Quant à la cosmologie, c’est la science de la forme globale de l’univers, à la fois dans l’espace et dans le temps (ce qui inclut donc son évolution, et donc éventuellement son origine et sa fin).

Voilà donc un laboratoire aux activités passionnantes, n’est-ce pas ? (Il est probable que je le rejoigne très prochainement 😉 …)

Mais les passions sont relatives, et certains pourront considérer légitimement que ces questions sont de peu d’intérêt pratique, qu’elles sont anachroniques (compte tenu de la situation des hommes et du monde), ou bien fumeuses, voire illusoires. Quoi qu’il en soit, pour ceux qui se sentent intéressés, le programme scientifique de la journée du 6 mai aura peut-être de quoi susciter leur intérêt : quatre conférences, tout d’abord de notre cher Jim Cronin – père de l’Observatoire Pierre Auger (le détecteur de rayons cosmiques ultra-énergétiques, en Argentine, dont il faudra que je vous parle un jour…), et par ailleurs prix Nobel de Physique ! – puis une conférence de Gabriele Veneziano, professeur au Collège de France, et surtout très grand physicien, père de la fameuse « théorie des cordes » (un des cadres les plus fructueux de la physique moderne), ensuite, une conférence de Jacques Paul, membre fondateur de l’APC, justement, et père de l’astronomie gamma en France, et enfin une conférence de Stephen Hawking, que l’on ne présente plus, et dont les travaux sur la relativité générale, les trous noirs et l’origine de l’univers justifient pleinement la considération exceptionnelle de ses pairs (et du grand public – encore lui 😉 ).

Si vous êtes intéressés par cette quadruple conférence assez exceptionnelle, vous pouvez y assister (à la Bibliothèque Nationale de France, à Paris). Il suffit (en principe) de vous inscrire ici.

Bref, je referme cette parenthèse.
Pour reprendre le fil du questionnement sur le sens et la portée du questionnement lui-même, je me demande comment mes collègues situent leurs interrogations scientifiques dans l’histoire de la pensée, d’une part, et dans l’histoire de la conscience, d’autre part (en ne donnant d’ailleurs pas forcément ici un sens temporel, et encore moins linéaire, au mot histoire).

Du coup, comme il est possible, en s’inscrivant sur le site web ci-dessus, de poser une question par Internet à Stephen Hawking (à laquelle il répondra peut-être à l’issu de son intervention sur l’origine de l’univers), j’ai posé la question suivante :

La question de l’origine de l’univers est principalement soulevée en Physique en relation avec le « temps ». Pensez-vous que la cosmologie pourra à terme élargir sa perspective historique ? Dans quelle mesure l’ontologie peut-elle être considérée comme faisant partie de la Physique ?

J’imagine qu’il ne pourra pas répondre à toutes les questions. Mais s’il répond (et s’il comprend que la question porte sur un autre type d’origine – non pas temporel, mais ontologique – du monde physique), je vous tiendrai au courant !

En attendant, le temps poursuit sa course sur la planète Terre.

À Paris, c’est le printemps, les soirs s’allongent comme les saules…
Saule parisien, sur l'île de la Cité
Lumineusement !
ET

Questions relativement essentielles ou essentiellement relatives…

Les choses qui arrivent ont-elles un sens ?

Il semble que chacun ait sa propre opinion sur ce qui fait sens, ce qui peut faire sens ou ce qui devrait faire sens. De même, certains d’entre nous se posent des questions qui n’émeuvent apparemment pas les autres, et réciproquement.

Qu’est-ce qui fait qu’on se pose telle question plutôt que telle autre ? Que tel sujet nous intéresse au plus haut point, et pas tel autre – quand bien même notre voisin le juge de la plus haute importance ?

On peut probablement dire que les questions qui nous taraudent ou qui nous motivent sont celles qui nous paraissent receler un sens profond, qui promettent de constituer une clé nous permettant d’accéder à une représentation plus globale du monde, par exemple, en mettant en place divers éléments d’un même puzzle, en permettant d’articuler des aspects apparemment distincts de la réalité, mais dont on pressent qu’ils sont liés de manière intime.

Mais il faut bien constater que nos intuitions sur ce qui est crucial et ce qui ne l’est pas sont très diverses. Est-ce à dire que les questions que l’on juge essentielles sont éminemment personnelles ? Sans doute dépendent-elle de notre histoire, de notre représentation actuelle du monde. Il est un fait qu’au cours de notre vie, les questions que nous nous posons évoluent considérablement. Il est d’ailleurs intéressant de noter qu’on abandonne parfois certaines questions qu’on jugeait capitale, alors même qu’aucune réponse ne nous a été apportée ! Simplement, on cesse de penser que telle question est pertinente. Soit on a compris (ou cru comprendre) qu’elle ne l’était pas. Soit on en a identifié de plus profondes encore. Soit on l’a en quelque sorte oublié en chemin, nos centres d’intérêt ayant dérivé, brutalement ou imperceptiblement. Il y aurait sans doute des choses à apprendre sur nous-mêmes en observant l’évolution de nos questions fondamentales…

Mais il y a aussi certaines questions qui s’imposent à un grand nombre de gens avec une force comparable. Là encore, ces questions sont toujours datées, au sens où elles émergent en relation avec des connaissances ou des événements préalables (de manière évidente, elles ne peuvent se poser que lorsque les notions qui permettent de les formuler sont connues et assimilées). Mais certaines questions scientifiques, par exemple, semblent faire pratiquement l’unanimité à une époque donnée, parmi une communauté de chercheurs partageant une culture commune. C’est ainsi que sont régulièrement formulées des questions ou des problèmes clés, dans telle ou telle discipline, et que des expériences ou des missions parfois très coûteuses sont engagées, sur la base d’un consensus quant à l’importance des résultats attendus, au cœur d’un dispositif théorique global.

Est-ce à dire pourtant que ces questions sont vraiment essentielles ? Probablement pas. Il ne saurait y avoir de réelle objectivité dans l’évaluation de la pertinence d’une question, parce que ne pourrait être que relativement à un contexte donné, et que ce contexte est lui-même en parti subjectif, dépendant des intuitions des uns et des autres. Au fond, je pense que chacun sait – ou devrait savoir – que la question qu’il se pose, même avec tant de force, n’est pas vraiment la question fondamentale. Cela peut d’ailleurs l’inciter à garder une oreille attentive et l’esprit ouvert à d’autres questions qui pourraient se présenter, et qui porteraient plus loin, ou bien contourneraient le problème opportunément, ou bien simplement mèneraient tout à fait ailleurs, mais peut-être sur une voie plus riche encore. Il n’est jamais bon de s’accrocher à un problème : la rigidité d’esprit est souvent le principal obstacle au progrès personnel ou collectif.

Plus généralement, il me semble que chaque question cruciale qui émerge (à un moment donné, dans un lieu et dans un contexte donnés, pour une personne ou un groupe de personnes donné) n’est jamais qu’une question intermédiaire, qu’on suppose pouvoir nous conduire à quelque chose de plus fondamental, de plus vaste, de plus essentiel pour nous. Peut-être y a-t-il une question ultime, mais d’une certaine façon nous estimons qu’une telle question n’est pas inaccessible directement, ou bien (ce qui revient au même) que nous ne sommes pas prêts pour l’affronter, ou simplement la comprendre. Alors nous cheminons, et ce chemin nous mène de question cruciale en question cruciale, sur une route souvent sinueuse, et pouvant présenter de nombreux embranchements, tantôt divergents, tantôt convergents.

C’est ainsi qu’à un moment donné sur la planète, les questions que se posent les gens peuvent être très diverses, d’une civilisation à l’autre, d’une culture à l’autre, et même d’une personne à l’autre au sein de la même société. L’un va se demander avec ardeur quel peut bien être le sens de tel rêve qui lui a semblé particulièrement signifiant, quand l’autre considérera que ça n’a pas la moindre importance, que cela relève du hasard, ou d’une contingence insignifiante. Inversement, ce dernier pourra se demander pourquoi telle fleur a treize pétales exactement, alors le premier se contentera parfaitement d’un simple « c’est comme ça »… Un autre se demandera pourquoi le morceau de journal qu’il vient de trouver par terre porte un bout de titre « …TTENTIO… AUX ARR… » et le numéro de page 6, alors que nous sommes le 6 juin, et qu’il y a justement 6 lettres à son nom et à son prénom, et trouvera totalement saugrenu que son voisin s’interroge sur le fait que l’espace ait trois dimensions, plutôt que 7 ou 16.

Il n’est pas rare de voir les uns sourire – voire s’offusquer ! – des questions que se posent les autres.

Ils ont tort, assurément ! Mais, obnubilé par ses propres « questions cruciales », chacun considère que celui qui ne se les pose pas est un ignorant – soit qu’il ne voie pas que ses questions sont en réalité stupides, soit qu’il n’aie pas l’intelligence ou la connaissance lui permettant de voir que celles-ci sont plus profondes que celles-là.

Sans doute est-ce la rançon de la fièvre avec laquelle nous tendons à nous poser les questions que nous jugeons capitales, et sans doute cette fièvre a-t-elle aussi son utilité, puisqu’elle nous enjoint à consacrer une attention et des efforts considérables à son étude, laquelle est bel et bien susceptible de nous faire avancer – et même, dans certains cas (rares, hélas !), de faire avancer de nombreuses personnes. Mais lorsque les tensions montent entre les uns et les autres, voire en nous-mêmes, il est peut-être bon de se souvenir un peu de la relativité foncière des questions particulières, et même des problématiques générales. L’étymologie du verbe « obnubiler » devrait pouvoir nous y aider 😉 Le latin « obnubilare » signifie « recouvrir de nuages » (comme dans nébuleux…) : à coup sûr, de quoi nous empêcher d’y voir clair !

Et si nous avons momentanément des centres d’intérêt divergents, sans doute n’est-il pas inutile non plus de considérer que nous avons probablement tous, au fond, les mêmes interrogations essentielles, ou peut-être – qui sait ? – la même question ultime (s’il y en a une), qui pourrait être quelque chose comme « qui suis-je ? », ou bien « qu’est-ce que la réalité ? », « qu’est-ce que la conscience », ou plus sûrement encore : « que veut dire être ? ».

Ces questions sont sans doute au cœur de la nature humaine, voire de la conscience, au sens le plus général qui soit. Elles me rappellent en tout cas la devise inégalable des Humains Associés : « n’allons pas vers ce qui nous divise, mais vers ce qui nous unit ! »…

ET

Hanami

Hanami parisien !

Bon, bien sûr, ce n’est pas Kyoto. Le ciel au-dessus de ces branches n’est pas imprégné des subtils encens filtrant à travers les toits galbés des temples zen. Mais la géographie ne limite que l’esprit qui s’y laisse enfermer !

Hanami parisien !

Il n’y a pas de section « langues et cultures orientales » à l’Université d’Orsay, mais rien n’empêche de s’attarder un peu sur l’un des parkings du campus, pour contempler la splendeur universelle du printemps et pratiquer, l’âme recueillie, l’hanami…

Hanami parisien !

C’est beau, un cerisier en fleur !

Entre nous, chers lecteurs à l’esprit vagabond et sensible, ne trouvez-vous pas qu’il y a aussi dans la nébuleuse d’Orion comme une invitation secrète à un long hanami cosmique ?

[Ô délicat enchantement ! Un jour, je vous parlerai des cerisiers en fleurs sur la troisième planète de kappa Orionis…]

ET

Fluctuat nec mergitur

Après les eaux de mars (cf. post d’hier), voici les eaux d’avril : 😉

Fluctuat nec mergitur

La Seine, à l’abord de l’île de la Cité. Et Notre-dame, bien sûr…

Le navire — je devrais dire la nef ! — tangue un peu au bout de mon objectif, mais n’est pas submergé. Nec mergitur !

Comme le crépuscule descend, je regagne la rive à la nage 😉 :

Fluctuat nec mergitur

C’est beau, Paris !

ET

São as aguas de março

L’eau, la vie, Mars…

C’est étonnant comme notre vie mentale est balisée de toute part sans que nous en ayons vraiment conscience. Je ne parle pas ici des conditionnements en tout genre qui accompagnent notre vie quotidienne – conditionnements d’ordre social, politique, familial, civilisationnel, qui sont légion ! Mais sans qu’on le sache vraiment, on a tout un tas de conceptions sur le monde, l’univers, la vie, la matière, le temps, les animaux, le sommeil, les rêves, qui forment une sorte de cadre général à notre vie. Des croyances, au sens plus encore ethnologique que psychologique. On ne les formule pour ainsi dire jamais (pas même à soi-même), mais si on venait à apprendre qu’elles sont fausses, on en serait très surpris, voire bouleversé, et c’est ainsi qu’on apprendrait qu’elles exerçaient une sorte de poids caché sur notre esprit, une influence occulte sur notre conscience.

Il fut un temps où l’on pensait que la Terre était plate, ou que le Soleil tournait autour de la Terre. On ne se le disait pas tous les matins en se rasant – il est probable même que la plupart des gens n’avaient jamais réalisé qu’ils pensaient cela, qu’il y avait cela à l’arrière-fond de leur conscience. Mais un jour, on apprit qu’il n’en était rien.

Et pourtant, après tout, qu’est-ce que ça change ?

Or c’est cela que je trouve étonnant. Au fond, que le Soleil tourne autour de la Terre ou que ce soit l’inverse, qu’est-ce que ça peut bien faire ? Quiconque abrite en soi la flamme de la vérité jugera cette question parfaitement hérétique. Dangereuse, même, pour la connaissance, et même, bien au-delà de notre civilisation présente, pour l’humanité. Je partage totalement cet avis ! Et pourtant, il faut bien reconnaître que, dans les faits, la mécanique céleste n’a pas la moindre incidence sur la vie des citoyens, et même dans une large mesure sur leur représentation du monde.

C’est là où je voulais en venir.

Prenons un exemple : il y a ceux qui croient aux extraterrestres et ceux qui n’y croient pas. Étrangement, ils vivent très bien ensemble ! Heureusement, me direz-vous (certes !), mais c’est tout de même étrange qu’on puisse avoir des perspectives totalement différentes sur des questions parfois assez fondamentales et ne pas y accorder la même importance. Pire, on n’y prête en réalité pas la moindre attention !

J’ai mentionné cette vieille question des extra-terrestres pour une raison liée à la photo de Mars ci-dessus, mais il y a bien d’autres exemples plus fondamentaux : la matière, l’esprit, la réincarnation, Dieu, le CPE (OK, c’était pour rire 😉 )…

Une personne croyant à la survie de la conscience après la mort peut parfaitement vivre à côté d’une autre qui n’y croît pas, sans que jamais la question ne soit abordée, et sans que leur vie, leurs paroles, leurs actions soient le moins du monde distinguables ! Toutes deux peuvent même vivre ou travailler avec une autre qui ne s’est pour le coup jamais posé la question à elle-même ! Il y a probablement une croyance de cet ordre dans le fond de son esprit (de sorte qu’elle serait surprise d’apprendre qu’il en va de telle façon ou de telle autre), mais elle l’ignore, ou bien tout simplement s’en moque éperdument : ça n’a pas d’incidence sur sa vie, même mentale !

N’est-ce pas le signe que nos vies sont vraiment étriquées ? Que nos rapports humains sont terriblement maigres et sans substance, puisque nous nous cantonnons manifestement toujours à des domaines de notre expérience qui ne font pas appel à ces croyances cachées, toile de fond pourtant rigide de notre réalité mentale ? Ni avec les autres, ni pour nous-mêmes, bien souvent, nous n’explorons ces franges de notre esprit qui représentent le cœur de notre représentation du monde, beaucoup plus proche de notre identité humaine que ce à quoi nous nous rattachons pour nous évaluer les uns les autres ou nous juger nous-mêmes.

Bref. Reprenons : l’eau, la vie, Mars…
Quoi qu’on en dise, cette question éveille en nous des perspectives immenses, des horizons à couper le souffle. Serait-il possible qu’il y ait eu par le passé de véritables océans sur Mars ? Si ce fut le cas, et compte tenu de ce qu’on sait aujourd’hui sur la vie et ses origines, notamment au regard des théories de panspermie (ou tout du moins des éléments tangibles qui en soutiennent le principe, comme la présence de nombreuses variétés de molécules prébiotiques dans le milieu interstellaire), il y a de fortes chances que de la vie, au moins dans ses expressions les plus simples, ait bel et bien pris forme sur Mars ! Oui, sur Mars ! Aussi près ! Et si de l’eau liquide subsiste dans le sous-sol martien, cette vie pourrait même persister aujourd’hui ! Oui, si près dans l’espace-temps !

Quoi qu’il en soit, si de l’eau à l’état liquide a bien recouvert de vastes régions de la surface de Mars, il faut s’attendre à ce que des sels s’y soient formés, par exemple des sulfates ferreux. En s’évaporant (puisque manifestement, ces mers ont disparu), l’eau aurait fatalement laissé de fortes concentrations de ces sels sur le sol (un peu comme on observe de vastes champs de sel sur certains plateaux andins…). Comme on aimerait pourvoir observer ces fins cristaux argentés briller dans le soleil de Mars ! Mais bien sûr, les vents martiens n’auraient pas manqué entre temps de recouvrir ces sels d’une couche de poussière plus opaque, de ce fameux ton rougeâtre qui donne au sol de cette planète sa coloration si particulière. Mais imaginons, juste pour rire, qu’un véhicule venu d’ailleurs se pose sur cette planète, et se prenne à arpenter quelques arpents de cette terre jadis immergée. En patinant quelque peu dans le sable léger, elle pourrait retourner la poussière et présenter à la surface un sol plus clair ou plus brillant. Non ?

Eh bien regardez à nouveau la photo en tête de ce message…

São as aguas de março
fechando o verao
é a promessa de vida
no teu coração !

(Un salut en passant au merveilleux poète : Antonio Carlos Jobim !)

ET

Finir par être…

Au hasard de rebonds successifs de site en site sur Internet, je suis tombé sur un dictionnaire kabyle/français, à la lettre « f », où j’ai pu lire ceci :

Fak : achever
Fakel : être
Fakk : terminer

Je ne connais rien à la langue kabyle, mais je présume que les mots « Fak » et « Fakk » ont étymologiquement la même racine, puisqu’en plus de leur écriture — et probablement de leur prononciation —, leur signification est proche. Du coup, en voyant le mot « être » coincé entre ces deux verbes, je me suis dit qu’il avait peut-être aussi la même racine en kabyle…

Ce serait très intéressant. Il y aurait dans l’être quelque chose de l’ordre de l’achèvement. Comme une promesse, une aspiration. Non pas simplement une attente, mais quelque chose qui relève d’un processus actif, qui serait en cours, puisque susceptible d’être achevé… un jour. Un beau jour. Un jour extraordinaire.

Ce jour sublime où nous serons enfin !

Que l’être authentique ne soit pas donné mais à conquérir, voilà qui me semble à la fois juste et rassurant. Depuis le déchaînement de la course au « progrès », la conquête prédatrice et matérialiste du monde, la fuite en avant consumériste et satisfactionniste, on n’accorde plus la moindre attention à la qualité et à l’intensité de l’être.

Dans cette perspective sans perspective, le réel serait tout simplement donné, et donc à prendre, avec empressement et sans ménagement. La réflexion ontologique devient pour ainsi dire superflue, voire sacrilège… « hontologique ».

Aussi l’eschatologie implicite dans cette étymologie de l’être apporte-t-elle un souffle oxygénant.

Un peu d’espoir, aussi : nous allons bien finir par être ! 😉

ET

Tomber de haut…

Je tente volontairement de tenir les commentaires politiques (sauf en un sens plus général) à l’écart de ce blog, préférant concentrer mes interventions dans ce domaine sur d’autres sites, forums et blogs. Il faut dire que tout cela, vu d’Orion… 😉

Mais l’actualité est pressante, et on entend tellement de choses autour de ce fameux CPE et des manifestations qui l’accompagnent… Juste un mot, alors.

Sur les forums des Humains Associés, j’ai trouvé un lien vers un dossier intéressant réalisé par l’Express (Les racines de la révolte), dans lequel on trouve notamment ceci :

« Il y a de la dignité blessée dans la réaction des jeunes », observe le sociologue du travail Jean-Pierre Le Goff. À propos des diplômés sous-employés, François Dubet parle même de « noblesse déchue ». Les enfants nés dans les années 1980 ont été élevés dans l’idée que la jeunesse était le moteur de la société, du changement, de l’Histoire. « Ils ont été encensés avec une démagogie extrême, soutient Le Goff. On les a traités comme des citoyens à part entière bien avant leurs 18 ans. C’étaient les rois. » On leur a demandé d’être créatifs, autonomes, responsables, bref d’être les « auteurs d’eux-mêmes », comme dit Paul Yonnet. De quoi fabriquer des fils et des filles aimants pour les baby-boomers. Mais aussi – c’est le phénomène Tanguy – dépendants pour un bon bout de temps.

Un peu plus loin :

Les enfants du désir, si choyés, si aimés, prennent le réel en pleine figure. C’est un choc auquel ils étaient peu préparés. […] Cette peur irrigue toute une jeunesse victimisée qui a le blues, quelles que soient les dissensions de ses membres. Ils étaient des héros. Ils tombent de haut.

Ces analyses me paraissent très justes, et tout autant alarmantes. Il y a une forme de naïveté incroyable chez ces « jeunes », dont on ne peut bien entendu pas les tenir pour responsables, puisqu’ils sortent à peine du fantasme angélique et destructeur de leurs parents.

Dans toutes les discussions et les revendications qui se font jour autour du CPE, on note une forte captivation par une réalité imaginaire, un hypnotisme quasi religieux, dans le sens le plus primitif du terme, mélangeant la terreur d’une part et la fascination pour une construction mentale (une représentation idéalisée du monde) aussi illusoire que romantique d’autre part.

Or la rédemption de la situation présente ne saurait résider dans la consolidation forcenée (voire violente ! ) du fantasme fondateur, qui, fort heureusement en somme, prend l’eau de toute part. On ne peut pas imposer à la réalité un fantasme, ou du moins pas longtemps, et pas sans provoquer de terribles convulsions, notamment chez les plus fragiles (socialement et intellectuellement) et les moins « nantis » (comme on dit).

Comme l’analysent les sociologues, aujourd’hui les jeunes tombent de haut. Et ce qui est plus terrible encore, c’est de voir leurs parents commettre à leurs dépens la même erreur une seconde fois, appuyant dans le sens du maintien du fantasme (qui est en vérité le leur) plutôt que dans l’accompagnement vers la sortie du rêve et l’affrontement de la réalité. Car ce sont bien ces parents (à titre privé comme à titre collectif, par leurs activités dans la société) qui sont responsables pour l’essentiel de l’impréparation à ce monde de la nouvelle génération, ou à l’inverse de l’impréparation du monde aux modes de pensée et de comportement qu’il lui ont inculqués. Las de chanter des berceuses à leurs enfants (trop fatiguant, trop contraignant, trop traditionnel…), ils ont laissé la société leur en chanter. Aujourd’hui, le réveil est brutal. Car tout en répandant le mythe d’un hédonisme individualiste triomphant, ils n’ont pas rendu la société moins violente et moins destructrice, au contraire !

Aujourd’hui, le déni de réalité orchestré par la génération précédente laisse la jeunesse totalement désemparée devant un monde qui s’est par ailleurs considérablement durci. Et l’on peut s’indigner de voir à nouveau cette génération installée, médias en tête, renoncer aux débats de fond et encourager une approche formelle des problèmes actuels (dénonciation des méthodes, exacerbation des rapports de force émotionnels, etc.) plutôt qu’une recherche de voies alternatives concertées.

On a presque le sentiment que ce sont finalement les jeunes, ici, qui seraient spontanément les plus disposés à regarder la réalité en face. Bien obligés : ils y sont immergés corps et âme et la subissent de plein fouet, eux !

Mais la spontanéité ne règne jamais longtemps, hélas !, sur la scène politique et sociale française, où le moindre mouvement d’opinion est guetté par des prédateurs à l’affût trop heureux de trouver enfin du grain à moudre.

Quitte à en dénaturer l’esprit et en compromettre l’issue…

ET

Baby-foot à 5 300 mètres

Chose promise, chose due !
Voici donc la fameuse photo (cf. post du 23 mars) de la partie de baby-foot qui s’est déroulée il y a une dizaine de jours à 5 300 mètres d’altitude, dans la salle de détente de l’observatoire de Chacaltaya – la seule véritablement spacieuse et non encombrée d’appareils, câbles et instruments divers…
baby-foot à Chacaltaya

La partie fut très brève, et la modestie m’empêche de vous en communiquer le résultat 😉

Un grand merci à Xavier, auteur de la photo et organisateur du meeting !

ET

Evo Morales et la fête de la mer…

Bon, il faudra un jour que je m’achète un appareil photo numérique. Celui de mon téléphone portable ne m’a pas permis de faire mieux que ceci :

Fête de la mer à La Paz (Bolivie)

Sinon, vous auriez aperçu Evo Morales, au milieu, à l’avant du cortège.

Au lendemain du double attentat qui a fait deux morts et huit blessés dans deux hôtels de La Paz, nous eûmes la surprise, en rentrant à notre hôtel le soir de la visite à Chacaltaya (voir post précédent), de trouver les rues bloquées et un cortège de policiers en rang d’oignons (tiens, ça faisait longtemps que je n’avais pas utilisé cette amusante expression !).

Fête de la mer à La Paz (Bolivie)Fête de la mer à La Paz (Bolivie)
Nous savions que la « fête de la mer » aurait lieu le lendemain (le 23 mars), mais apparemment, un défilé officiel était organisé dès ce soir (le 22, donc). Devant l’ampleur du déploiement d’uniformes, il nous est venu l’idée que le nouvellement élu président bolivien, Evo Morales, récent hôte de l’Élysée pour son premier voyage officiel en Europe, pourrait être présent, et qu’on pourrait, qui sait, l’apercevoir…

Et bien oui ! Quelques minutes plus tard, après quelques musiciens, chevaux et un dérisoire canon mitrailleur à roulette remorquée par un véhicule dont le pot d’échappement faisait littéralement des étincelles et lâcha sous notre nez un immense nuage d’une fumée noire parfaitement nauséabonde (non, non, je ne me moque pas, je décris fidèlement…), une sympathique cohorte passa devant nous, avec notamment Evo Morales (il va de soi que j’aurais été bien en peine de reconnaître toute autre personnalité bolivienne, …), vêtu de son habituel blouson et de son écharpe à motifs ouverte sur sa poitrine…
Fête de la mer à La Paz (Bolivie)Fête de la mer à La Paz (Bolivie)
Fête de la mer à La Paz (Bolivie)Fête de la mer à La Paz (Bolivie)
[Ça, ce sont les photos (catastrophiques !) que mon appareil est parvenu à enregistrer…]

Pourquoi vous parler de cet événement ? D’abord pour témoigner de la forte impression que m’a faite Evo Morales — non, je ne suis pas psychologue, et non, je ne l’ai pas vu plus d’une minute, de loin, et en représentation ;-), mais la simplicité de son salut, son charisme élégant et détendu, et son énergie apparemment sincère et humaine m’ont semblé effectivement authentiques.

Mais je voulais surtout vous parler de cette « fête de la mer », pour le moins incongrue. Quiconque connaît un peu la géographie de l’Amérique du Sud se sera bien sûr étonné de voir la mer ainsi célébrée dans un pays n’ayant pas la moindre façade maritime, coincé qu’il est entre le Brésil, le Paraguay, l’Argentine, le Chili et le Pérou. Alors pourquoi cette fête de la mer ? Eh bien parce que le 23 mars, la Bolivie commémore en réalité la perte de son accès à la mer, en 1879, au bénéfice du Chili, lors de la guerre du Pacifique !

[Étrange, cet assemblage de mot, vous ne trouvez pas ? « Guerre du Pacifique »… l’Histoire est toujours la plus inventive des surréalistes !]

Mais cela veut donc dire que la Bolivie commémore une défaite ! Imagine-t-on la France commémorer Waterloo plutôt qu’Austerlitz ? Très peu, en effet… Seulement voilà, si j’ai bien compris, la Bolivie n’a jamais gagné aucune guerre ! De conflit en conflit, elle a perdu une bonne partie de son territoire au profit de chacun de ses voisins, notamment du Paraguay et du Brésil, mais aussi, donc, du Chili. Alors, faute de victoire, il faut bien commémorer quelque chose…

Mais quand on sait l’importance économique et stratégique d’un accès à la mer (pour le développement d’un pays et ses échanges avec le monde), on comprend que les relations entre le Chili et la Bolivie soient demeurées, jusqu’à aujourd’hui encore, particulièrement tendues. Je l’ignorais d’ailleurs, mais il n’y pas de relations diplomatiques officielles entre les deux pays.

Pourtant, la situation semble être en train d’évoluer de manière très positive. D’une part, Evo Morales s’est rendu au Chili il y a moins de deux semaines, pour l’investiture de la toute nouvelle présidente, Michelle Bachelet. D’autre part, une rencontre aura lieu (est-ce demain ?) en Bolivie entre les deux nouveaux chefs d’État ! Il se passe décidément des choses fort intéressantes dans ce coin du monde en ce moment. La Bolivie, dont la pauvreté de la population est douloureusement visible à La Paz, et plus encore à El Alto, possède en réalité de très grandes richesses, notamment gazières et pétrolières. La découverte (en 2000, si j’ai bien compris) d’une immense réserve de gaz dans le sud du pays a réveillé au sein de la société un certain nombre de questions difficiles pour le pouvoir. À qui profite ces richesses ? Comment se fait-il que le peuple en soit apparemment privé ? C’est ce courant de mécontentement — fort compréhensible ! — qui a finalement conduit au pouvoir un Evo Morales bien décidé à retirer des mains des compagnies pétrolières étrangères, pour entamer une redistribution plus équitable et une réappropriation par la Bolivie de son potentiel de développement.

Dans ce contexte, il semble qu’il ne soit pas impossible qu’un accord tout à fait intéressant soit un jour conclu, par lequel le Chili rendrait à la Bolivie un accès à la mer, en échange peut-être d’une participation à l’exploitation des richesses pétrolières et gazières, ou d’un accès à ces ressources à prix avantageux. Je ne suis en aucun cas un connaisseur de ces questions, mais le simple fait qu’un tel type d’accord soit envisagé me paraît tout à fait remarquable. Il faut une maturité politique assez rare pour permettre une cession de territoire « à l’amiable », et en tout cas sans guerre physique. La diplomatie, parfois, sait se trouver des voies moins primitives… Excellente nouvelle !

Et au bout du compte, si la Bolivie reprenait possession de ses richesses naturelles et retrouvait dans le même temps un accès à la mer (soit directement, par la cession de territoire, soit virtuellement, par le biais d’accords spécifiques), on comprend aisément ce qui pourrait en résulter pour le développement du pays et l’amélioration des conditions de vie de ses habitants.

Mais encore une fois, je précise que je n’y connais rien. Je saisis simplement l’occasion de quelques informations glanées ici et là sur la situation de la Bolivie pour rêver à un monde meilleur, plus raisonnable et plus humain. Fol espoir ? Peut-être. Mais la situation ici semble évoluer bel et bien, et assez rapidement. Affaire à suivre, donc… et bonne chance à Evo Morales !

ET