Premier podcast, depuis Catane (1)

Du nouveau sur ET d’Orion !

Grâce au talent incomparable de Sacha et Natacha, me voici lancé dans l’aventure du podcast ! Comme en témoignent leurs blogs et le laboratoire du web qu’est le site Mémoire-Vive, ils sont les experts les plus compétents, les mieux informés et les plus inventifs de toute la blogosphère ! 😉 C’est par leurs bons soins, et parce qu’une certaine société de téléphonie finlandaise (vive l’Europe !) ne s’y est pas trompée non plus, que je me retrouve presque magiquement en possession d’un Nokia N90 qui me permet de réaliser de petites séquences vidéos qui se retrouveront de temps en temps sur ce site !

Ceci est donc mon tout premier podcast, un essai dont vous aurez l’indulgence de ne pas trop railler la piètre qualité…

Je l’ai tourné à Catane (ou Catania), à l’occasion d’une conférence dans cette ville sicilienne où les laves de l’Etna se jettent parfois ardemment dans la mer, et le hasard a voulu que j’y sois témoin d’un événement que j’aurais tenu pour parfaitement anecdotique si je n’avais pas assisté ensuite aux scènes de liesse qu’il a entraînées dans toute la ville, et probablement au-delà…

Ce podcast – que dis-je, ce vidpodcast ! hé hé… – se déroule en quatre parties (voir les trois posts suivants, car je ne sais pas poster plusieurs vidéos dans le même message !), prises à différents moments de cette journée du 28 mai, étrangement historique pour la ville de Catane et pour ses habitants…

Suspense ! 😉

ET

Premier épisode : je ne sais pas encore ce qui se passe…

Fin d’éternité pour les neiges alpines

On dit que l’éternité fascine et constitue le rêve intime de l’humanité depuis la nuit des temps. Cela reste à prouver ! Car Woody Allen nous a prévenus, « l’éternité, c’est long… surtout vers la fin ! ».

Que l’Homme ait peur de la mort – au sens de la fin pour lui de ce qu’il expérimente comme étant la vie –, c’est notoire. Qu’il cherche à éviter cette mort, à la repousser quand elle paraît prochaine, c’est même un fait biologique (ne parle-t-on pas d’instinct de conservation ?). Qu’elle représente ordinairement pour l’Homme un objet de crainte, voire de terreur, au point qu’une civilisation entière – la nôtre, en l’occurrence ! – aille jusqu’à en occulter la réalité foncière et inéluctable, c’est également un fait psychologique. Mais de là à vouloir l’éternité…

C’est toute la différence entre « vivre indéfiniment » et « vivre infiniment » ! Vivre indéfiniment, c’est vivre sans que se pose la question de la fin. Combien de temps ? On ne sait pas : c’est indéfini. Mais vivre infiniment, c’est ça l’éternité de Woody Allen : cette fois, la durée est parfaitement définie : c’est l’infini ! Et du coup… c’est long !

Sans doute devrait-on alors employer l’adjectif « perpétuel », plutôt que « éternel ». Le fameux mouvement perpétuel, que tant d’esprits avides ont poursuivi et cru tenir glorieusement au bout de leurs théories bancales, est bien un mouvement inscrit dans le temps, qui dure, dure, dure encore, et durera toujours, un temps infini.

Mais l’éternité peut être plus subtile, ou plus profonde, liée à un certain état, qualité, circonstance où le temps n’a pas de prise, où il n’opère tout simplement pas. Ce n’est pas que ça dure longtemps : c’est qu’il n’y a pas de durée ! Qui en a fait l’expérience ineffable, aussi fugitive soit-elle, ne peut ignorer sa valeur et sa puissance intimes, et trouvera sans doute dès lors aussi pâle que vaine toute recherche, scientifique ou magique, de ce qui serait une vie perpétuelle. À l’inverse, cette « sortie du temps », où le temps cesse d’être vécu dans sa temporalité, où la conscience se trouve immergée dans l’immédiateté (à moins que ce ne soit l’inverse), où elle se saisit de l’instant, ou bien se retrouve saisie dans l’instant, et par là même comme dessaisie du temps, alors là, oui, cette atemporalité (extratemporalité ?) peut représenter pour l’Homme le fruit d’une quête fascinante.

Mais je ne suis pas philosophe, et je voulais simplement parler… des neiges éternelles. Celles dont on apprenait dans les livres de classe, à l’École Primaire, qu’elles « ne meurent jamais », persistant sur les sommets de nos altières montagnes, été comme hiver. Les Alpes, principale chaîne de montagnes européenne, abritant les plus hauts sommets, offraient bien sûr tous les exemples souhaités. Mais je viens justement de les survoler, ces Alpes, dans leur partie la plus élevée, c’est-à-dire au point triple franco-helvético-italien, et je dois dire qu’il y a de quoi revoir en profondeur notre notion d’éternité.

J’avais déjà été frappé, lors d’un précédent survol des Alpes, à l’automne dernier, par la maigreur, voire la chétivité des derniers glaciers apparents. Je n’ai pas pu les voir cette fois, mais la rareté de la neige, même au-dessus de 3 500 mètres, augure assez clairement d’une fin toute prochaine. Rien d’étonnant à cela, bien sûr. Deux mots suffisent à résumer la situation : réchauffement climatique.

Alors voilà :

Les alpes, vues d'avion

Les alpes, vues d'avion

À vrai dire, je ne sais s’il faut vraiment s’alarmer de la disparition des neiges éternelles, ou pleurer sur la fonte des derniers glaciers – mêlant ainsi de bien vaines larmes aux dernières eaux ruisselant dans le creux de vallées sublimes, mais qui, à vrai dire, ne sont pas non plus éternelles…

Bien sûr, ces paysages sont inestimables. Je m’en suis abreuvé avec bonheur, j’en ai nourri mon âme et mon cœur autant que je l’ai pu. Mais qui sait ce que nous enseigneront les paysages à venir ? Le drame humain que va représenter le réchauffement climatique, en divers endroits du globe, est un sujet de préoccupation majeur, et il serait aventureux, voire coupable d’en sous-estimer ou d’en négliger l’ampleur. Sur ce point, je ne peux qu’appuyer les efforts de responsabilisation à l’échelle planétaire, et la mise en place de structures de solidarité opérant au niveau mondial de la manière la plus large, la plus désintéressée et la plus effective possible. Mais sur le plan des paysages, il me semble qu’il en va tout autrement. Périodes de glaciation et de réchauffement n’ont cessé d’alterner depuis bien avant que les mammifères n’existent sur la planète. La Terre évolue sans cesse. Les paysages de mon enfance ont disparu ? Et alors ? Mon enfance aussi, et je disparaîtrai à mon tour « pas plus tard que dans pas longtemps » !

Nous savons que la progression d’Homo sapiens vers les territoires d’Europe est liée à la sortie d’une ère glaciaire. Les sommets alpins vont cesser de connaître les neiges éternelles. C’est noté. Mais qui sait quelles espèces de fleurs sauvages vont naître ou s’installer sur ces pentes fraîchement découvertes, qui n’ont pas vu le soleil depuis peut-être des centaines de milliers d’années ? Et tous ces habitats nouveaux, gagnés sur la banquise, vers le Pôle Nord ? Les nouvelles mers éclosant sous nos yeux entre la Sibérie, la Scandinavie et le Groenland, seront-elles le cadre de nouveaux espaces de vie et d’échange, un nouveau foyer culturel, une nouvelle méditerranée pour le vingt-deuxième siècle ?

Il se peut que des biologistes experts et des géophysiciens expérimentés ne voient dans cet élan du cœur vers un futur encore très incertain qu’angélisme vulgaire et pathétique mythologie. Mais disons qu’il s’agit simplement d’une ode au changement, à l’évolution, au mouvement. La vie est mobile. L’esprit est mobile. Les ruisseaux sont mobiles. Et rappelez-vous, l’éternité, c’est long !

Quoi qu’il en soit, qu’on le déplore, qu’on s’en réjouisse ou qu’on observe simplement avec tendresse les multiples mouvements de la Terre et de la vie qu’elle abrite, la modification des paysages alpins est en marche. Elle n’a jamais cessé de l’être, bien sûr, mais disons que le mouvement s’accélère. Les neiges éternelles n’en ont probablement plus pour longtemps sur la majeure partie du massif. Trente ans ? Vingt ans ? Dix ans ?

Au début, on croit qu’on a tout le temps. Et puis, en fait…

« L’éternité, ça va vite… surtout vers la fin ! » 😉

ET

PS : une pensée, tout de même, pour le ruisseau s’écoulant du glacier (surtout sous la lumière unique de la femme aux semelles de vent). Mais naître et disparaître, pour renaître à nouveau au printemps prochain, je suis sûr qu’il s’en moque, lui, et même… que ça lui plaît !

Comme une orchidée sous la pluie de mai…

Vents et averses ont secoué Paris cette fin de semaine. Sens dessus dessous, bataillant à l’aveugle dans des gémissements fragiles, la nature a trouvé des replis de fortune. Mais restant généreux jusque dans leur obscurité, les éléments ont levé l’hypothèque.

Au soir soudain le ciel s’entrouvre et la pureté magnanime de l’azur se laisse de nouveau saisir.

Une orchidée, sur le balcon, sèche le galbe immaculé de sa corolle de grâce.

Comme une orchidée sous la pluie de mai (1)

La gaieté se déploie. Son aise est végétale.
Dans les corps, la paix retrouvée chante le frais retour des âmes.

Paris, folle promesse pour tes soyeux bourgeons, laisse filer la nue vers d’autres horizons… 😉

Le panthéon, un soir de mai pluvieux...

ET

Temps et origine

Ce blog devient interactif, et je m’en réjouis !

Dans un commentaire au billet précédent, Denis me renvoie la question que j’avais posée à Stephen Hawking (cf. ici et ). Je n’ai pas de réponse précise à formuler (c’est pour ça que je posais la question 😉 ), mais je veux bien essayer d’en dire deux mots, dans l’espoir de recueillir d’autres points de vue ou d’autres éléments de réflexion…

Il me semble qu’on restreint beaucoup la question de l’origine en la considérant uniquement du point de vue temporel, comme le fait la cosmologie physique. Parler de l’origine de l’univers en se référant à son passé, c’est bien sûr intéressant, et même très naturel puisque notre expérience physique s’inscrit dans le temps. Projeter l’origine de l’univers dans les « premiers instants ayant existé », c’est également un réflexe naturel dans le contexte des théories de big bang, puisque l’analyse de l’évolution de l’univers montre que sa phase actuelle ne peut pas être suivie indéfiniment en remontant dans le passé, et qu’en ce sens elle a eu un « début » dans notre temps physique.

Pour autant, on sent bien que ce n’est pas suffisant. Supposons qu’on parvienne à identifier « l’instant initial de l’univers », ou plutôt l’état de l’univers à cet instant initial. On serait alors remonté à l’origine (temporelle) de l’univers, mais qui d’entre nous s’en estimerait pleinement satisfait ? Pas moi, en tout cas ! On connaîtrait peut-être alors « l’origine de l’univers », mais seulement dans un sens très restreint. En particulier, on ne saurait toujours pas ce que c’est que ce truc, c’est-à-dire d’où ça vient vraiment !

Comme je le disais, il est naturel de s’interroger sur l’origine de l’univers dans le temps, puisque notre expérience physique s’inscrit dans le temps. Mais elle ne s’inscrit pas seulement dans le temps ! De façon plus évidente encore, elle s’inscrit dans une certaine réalité, dans l’existence. Or quelle est l’origine de cette réalité ? Et qu’est-ce que l’existence ? Voilà des questions bien plus fondamentales que celle de l’origine temporelle !

Cette réalité apparente – c’est-à-dire celle qui nous apparaît –, quelle en est l’origine ? Non pas son origine temporelle (dans la dimension du temps, donc), mais son origine ontologique, dans la dimension des « apparitions » ou des « existants » ?

On touche là bien sûr à des questions par définition métaphysiques. Mais je ne pense pas qu’il soit ultimement possible de séparer physique et métaphysique, tout simplement parce qu’à chaque fois que la physique nous propose des concepts ou des objets fondamentaux pour décrire la réalité physique à son niveau le plus profond, elle nous propose dans le même temps de considérer ces concepts et ces objets comme ayant un certain rapport de vérité (au moins approximative) avec une réalité sous-jacente, avec un étant – et ceci n’est rien d’autre que de la métaphysique. (Sauf à se placer dans une perspective strictement positiviste qui me paraît, n’ayons pas peur des mots, aussi illusoire que stupide, à moins peut-être d’accepter que ce positivisme soit aussi un réalisme, ce que la plupart des partisans de cette approche imprudemment prudente rejetteraient, me semble-t-il…)

D’ailleurs, même au niveau physique le plus commun, force est de constater que la notion d’origine temporelle de l’univers est pratiquement contradictoire avec la théorie de la Relativité einsteinienne stricto sensu.

En théorie de la relativité, l’univers est donné une fois pour toute dans toute l’étendue du temps (et de l’espace). Il s’agit d’un espace-temps complet, sans histoire ni évolution. Tous les instants y ont le même statut : ils sont là, ensemble, conjointement, dans la réalité, et non pas l’un après l’autre. En ce sens, le problème du « commencement » tel qu’on se le pose habituellement est un problème interne, et pour ainsi dire arbitraire. Certes le point origine de la dimension temporelle (le « temps zéro ») a un sens en Relativité, mais il n’y aurait aucun sens à considérer que l’univers est de quelque manière « sorti » de cet instant zéro. Non. Tous les instants sont « sortis » conjointement. Ils sont là. C’est tout. Ou bien ils sont là – tous –, ou bien ils ne sont pas là – aucun !

Posée ainsi, la perspective temporelle de la physique apparaît non pas comme l’étude d’un déroulement partant d’une origine et remplaçant, instant après instant, un état de l’univers par autre, mais comme la description d’une forme globale de l’espace-temps. La notion de causalité ne fait que préciser la structure de cet espace-temps, et ne doit pas être entendu comme « ce qu’il y a “après” découle de ce qu’il y a “avant” »…

Pour autant, faut-il renoncer à aborder la question de l’origine sous un aspect plus général, dans lequel on pourrait formuler une question du type : « l’univers et tous ses instants sont donnés une fois pour toute, d’accord, mais d’où vient-il au bout du compte ? Qu’est-ce que c’est ? Peut-on envisager son émergence, non plus dans le temps, puisque le temps lui-même doit émerger, mais peut-être dans la dimension des essences, ou plus généralement encore, dans la dimension de l’être ? » ?

Je crois non seulement qu’il ne faut pas renoncer à ces questions, mais qu’elles sont déjà, au fond, le but poursuivi par la Physique (même si les physiciens n’en ont pas toujours conscience). Au-delà du « comment ça marche ? », il y a un « qu’est-ce qui se passe en vérité, qu’est-ce que tout ceci ? » qui est la vraie motivation de la recherche – avec l’idée que la nature d’une chose, comme la nature d’un être, peut être perçue, ou aperçue, dans les modalités de ses apparitions.

D’une certaine façon, l’identification de structures ou de réalités fondamentales (champs, particules, symétries, espace-temps…) sous-jacentes à la réalité physique est déjà un pas dans l’ontologie. Elle nous dit ce que les choses ne sont pas (en gros, elle dément systématiquement nos intuitions sensibles élémentaires), et ce qu’elles semblent plutôt être, à un certain niveau de description ou de perception. L’origine de cette tasse de thé, posée devant moi, est peut-être temporellement dans la conjonction des chemins suivis par ses atomes depuis leur création, dans quelques étoiles de la Galaxie il y a quelques milliards d’années. Mais l’origine des particules qui la composent est aussi à rechercher dans la manifestation de quelque chose qui existe à un autre niveau et qui en constitue la nature. Les modalités du passage d’une réalité sous-jacente à la réalité physique ordinaire, il n’est pas faux de dire que la Physique en explore déjà certaines étapes – par exemple, pour les initiés, le passage d’un espace de Hilbert de dimension infinie aux observables classiques, ou l’apparition d’objets tels qu’un espace métrique à partir d’objets intelligibles (mathématiques) plus fondamentaux, ou encore la mise en œuvre d’interactions entres des champs décrits par un Lagrangien possédant certaines symétries, afin de rendre compte de phénomènes susceptibles d’offrir un support à la perception sensible…

Pour aller plus loin dans cette voie, la Physique devra peut-être – sûrement ! – remettre en question ses fondements, voire sa perspective et même son approche. Mais ce ne sera pas la première fois ! 😉

Après tout, il n’y a qu’une Connaissance, et la Physique n’en est qu’une voie d’accès particulière, dont les limitations actuelles sont aussi nécessaires que provisoires. Si c’est bien la vérité qu’elle poursuit, elle saura s’adapter, s’élargir ou s’approfondir, chaque fois que l’exigera sa quête.

Et vous, qu’en pensez-vous ?

ET

Réponse de Stephen Hawking

Je vous avais promis (cf. billet du 23 avril…) de vous donner la réponse de Stephen Hawking à la question que je lui avais posée par Internet à l’occasion de sa venue à Paris, au cas où il l’aurait retenue pour y répondre publiquement lors de sa conférence de samedi dernier. Puisque Stephen Hawking avait effectivement préparé une réponse, je me dois maintenant de vous la donner.

Malheureusement, mes espoirs – peut-être naïfs, mais ne vaut-il pas mieux espérer naïvement que cyniquement désespérer ? – n’ont pas été comblés. Loin s’en faut !

À vrai dire, j’avais préparé une petite note à l’issue de sa première conférence, vendredi, lors de l’inauguration scientifique du laboratoire APC (AstroParticule et Cosmologie), dans laquelle j’exprimais ma vive désapprobation quant à la manière, aussi honteuse que tragique et ridicule, dont Stephen Hawking était mis en scène, non seulement vis-à-vis du « grand public », mais au sein même de la communauté scientifique. Et puis, sur les conseils d’une amie qui me veut du bien ;-), j’ai laissé la fièvre baisser… (pour tout dire, j’avais intitulé cette note « mascarade éhontée » !)

Je serai donc plus modéré ce soir, pour déplorer simplement qu’il se soit installé autour de Stephen Hawking ce qu’il faut bien appeler un culte, dans le plus mauvais sens du terme, où tout est fait pour entretenir le sentiment que ce chercheur – d’un immense talent, sans l’ombre d’un doute, et dont la contribution à la science physique est vraiment remarqauble, mais en aucun cas unique et inégalé – est l’oracle ultime de la physique dont nous attendrions tous le jugement infaillible et la lumière définitive.

Bref, inutile de s’étendre sur cette mise en scène, voire cette mascarade, qui n’a d’autre intérêt que de nous rappeler que lorsqu’on chasse un dieu par la porte, il arrive qu’un autre revienne par la fenêtre…

Mais – chose promise, chose due – voici la réponse qu’il m’a faite. Elle me paraît inintéressante dans ce contexte, ou tout du moins hors sujet, mais bon… [Il se peut que ma question fût également inintéressante, bien sûr, mais dans ce cas pourquoi l’avoir sélectionnée (seules deux questions ont été retenues !) ? À moins que ce que j’avais en tête ne fût tout simplement pas clair, et qu’il y ait eu un qui pro quo sur le sens de la question…] Je rappelle donc la question :

La question de l’origine de l’univers est principalement soulevée en Physique en relation avec le « temps ». Pensez-vous que la cosmologie pourra à terme élargir sa perspective historique ? Dans quelle mesure l’ontologie peut-elle être considérée comme faisant partie de la Physique ?

Et voici donc (à travers le chuintement du synthétiseur vocal, étrangement – ou peut-être volontairement ? – difficile à déchiffrer, comme d’outre-tombe…) la réponse de l’oracle :

The universe has a beginning in imaginary time, a direction in time that behaves like space. There is no beginning in real time, the time that you and I experience.
There would appear to be a previous contracting phase, and a bounce at finite density. (..?) cosmology is the study of the very large, while particle physics is the study of the very small.

Traduction, avec quelques explications pour les non-initiés :

L’univers a un commencement en temps imaginaire,

[Je précise qu’il s’agit là de la notion mathématique des nombres imaginaires, et non de la notion courante…]

une direction du temps qui se comporte comme l’espace.

[En effet, ce qui distingue la dimension du temps des dimensions d’espace, en relativité, disparaît si le temps prend des valeurs imaginaires (au sens mathématique), et le temps n’est alors plus du temps, à proprement parler, mais de l’espace ordinaire.]

Il pourrait y avoir eu une phase précédente de contraction, et un rebond à densité finie.

[Il est fait référence ici à une phase de l’évolution de l’univers qui aurait précédé la phase d’expansion actuelle, décrite par les théories cosmologiques de big bang. Dans le cadre d’une théorie cosmologique non quantique, cette phase de contraction est possible en principe, et pourrait représenter un état de l’univers “avant le big bang”, mais elle devrait être séparée de la phase actuelle par ce qu’on appelle une “singularité”, qui nous empêche d’en savoir quoi que ce soit (pas même si elle a bel et bien existé !), et qui interdit tout lien (ou toute influence) entre cette phase hypothétique et la phase actuelle. Bref, vous pouvez dire qu’elle a eu lieu, ou qu’elle n’a pas eu lieu, ou qu’elle était comme ceci, ou plutôt comme cela : personne ne pourra jamais vous contredire, mais vous ne pourrez jamais convaincre personne non plus… Tout est parfaitement égal du point de vue de l’univers physique dans lequel nous sommes.
Quand Stephen Hawking parle de “rebond à densité finie”, il fait justement référence à une possibilité d’éviter la “singularité”, qui correspond à une densité infinie. Pour ce faire, il utilise (je pense) ce que pourrait être la conséquence d’une théorie quantique de la gravitation (que les physiciens espèrent tous mettre un jour sur pied – peut-être dans pas trop longtemps…) sur la description cosmologique de l’univers, notamment via l’apparition du “temps imaginaire” (toujours au sens mathématique) auquel il faisait référence auparavant.]

[..?] cosmologie est l’étude du très grand, tandis que la physique des particules est l’étude du très petit.

[Là, c’est une remarque banale, dont je m’interroge sur la pertinence dans ce contexte…]
Bon, voilà. Cette réponse est sans rapport avec la question posée (du moins avec celle que j’ai eu l’intention de poser…). Dommage !
Mais bon, j’ai essayé… 😉

ET

Sept, nombre magique entre tous !

Sept, nombre magique entre tous !

Sept, comme les sept merveilles du monde.
Comme les sept jours de la semaine.
Comme les sept nains, ou les bottes de sept lieues.

Sept, comme les sept planètes (visibles à l’œil nu).
Comme les sept jours de la Création dans la Genèse.
Comme les sept péchés capitaux ou les sept trompettes.

Sept, comme 7, nombre premier, nombre premier de Mersenne, d’ailleurs (7 = 2^3 -1), nombre chanceux (au sens mathématique), nombre sûr (au sens de la cryptologie)…

Sept, comme le pH de l’eau pure.

Sept, comme l’heptagone, premier polygone régulier non constructible à l’aide de la règle et du compas.

Sept, comme le nombre de cuves dans un hexagone élémentaire de l’observatoire Pierre Auger (bon, désolé, là c’est très private joke 😉 )

Etc. Etc.

Et puis sept… comme Paris 7 !

Paris 7, c’est l’Université Dennis Diderot, à Paris. (Tiens, il y a 7 lettres dans Diderot !)

Bon, voilà : si j’ai été très absent de ce blog ces derniers jours, c’est notamment parce que je préparais une audition pour devenir professeur de cette université, et que cette audition a eu lieu… aujourd’hui !

Alors, alors ? Suspense…
En m’y rendant, j’ai fait un petit détour par une petite rue près de Jussieu (la rue des Chantiers – qui est effectivement en chantier en ce moment !). Alors que je hâtais le pas pour ne pas manquer l’heure, mon œil fut attiré par un petit bout de carton sur lequel j’allais poser le pied. Qu’était-ce ? Une carte à jouer ! Ça vous arrive souvent, vous, de tomber sur des cartes à jouer dans la rue ? Moi non plus !

À une époque, ça m’arrivait régulièrement, et je me disais : c’est bizarre, tout de même. Comment une carte peut-elle se retrouver comme ça au milieu de la rue, ou dans un caniveau ? Perdre un jeu complet, qui tombe d’un sac ou d’une poche, je comprends. Quelques cartes glissant d’un jeu, peut-être aussi (encore que…). Mais une seule carte ? Isolée. Y a-t-il des gens qui en sèment exprès ? Des férus de cartomancie qui laissent en quelque sorte certains messages savants à des passants en quête de signes, de symboles à interpréter ?

Toujours est-il que cela faisait bien une dizaine d’année que je n’en avais plus trouvé (les lutins étaient-ils en grève ?), mais que ce midi, justement, en me rendant à mon audition de Paris 7, je tombe nez à nez avec une de ces cartes, bien en évidence au milieu du trottoir, pratiquement sous ma chaussure !

Face vers le haut, c’était un… sept !

Bah oui, c’est comme ça. Un sept de pique.

Non, non, je ne suis pas en train de me reconvertir dans la cartomancie ! 😉 Mais c’était un clin d’œil amusant, auquel je me suis empressé de répondre par un amical sourire. Et, bien sûr, je ne pouvais pas laisser cette carte là, seule, dans la rue, sous un ciel menaçant, au beau milieu du trottoir, condamner à subir les assauts de la pluie ou de je ne sais quelle semelle indifférente.
Alors voilà, je l’ai ramassée, je l’ai glissée dans ma poche, et… la voici :

Ah, j’ai oublié de vous dire : oui, je l’ai eu, ce poste !
Me voilà donc professeur à Paris 7.

Vous en voulez davantage ? Au verso de la carte, il y avait marqué… « Paris » ! Si, si, c’est vrai ! Voilà, c’était une carte Paris 7…

Me voici donc admis à la table de jeu. Il reste maintenant à jouer la partie…

Par les sept doigts de la main, salut à tous !

ET

PS : Au fait, l’un des sept nains ne s’appelle-il pas « Prof » ?

Et le temps s’emballa le long du méridien…

En voyageant le long d’un méridien, comme je viens de le faire par exemple de Groningen à Paris, on peut faire une observation intéressante.

Méridien… le mot lui-même est intéressant !

Certes, tout le monde le sait : la Terre est ronde et tourne sur elle-même autour de l’axe des pôles. Un méridien, c’est n’importe quelle ligne allant d’un pôle à l’autre, ou plus exactement, n’importe quelle ligne les joignant « au plus court », c’est-à-dire en allant « tout droit » – autant qu’il est possible à la surface d’une sphère…

Comme la Terre tourne sur elle-même, le Soleil se déplace dans le ciel au cours de la journée, se levant à l’horizon, d’un certain côté du paysage (entre le sud-est et le nord-est), montant de plus en plus haut jusqu’à un maximum, et redescendant ensuite symétriquement vers l’horizon de l’autre côté du paysage (entre le sud-ouest et le nord-ouest). Le reste du temps, c’est la nuit. Pendant le jour, il y a donc une phase montante et une phase descendante, avec au milieu, un maximum d’élévation pour le Soleil. Cet instant, ce « milieu du jour », c’est « midi » : mi-di (comme la mi-temps d’un match de foot, mais à partir du latin dies, qui veut dire « jour », comme dans lun-di – le jour de la Lune –, mar-di – le jour de Mars –, mercre-di – le jour de Mercure –, etc.).

Alors, voilà : on sait bien sûr qu’il n’est pas là même heure au même moment partout sur la Terre (il peut faire nuit au Japon ou au Brésil quand il fait jour en France), mais il se trouve qu’il est midi exactement au même instant pour tous les points situés sur le même méridien ! De fait, comme midi, méridien vient de medius (milieu) et dies (jour). Ainsi, qu’on soit près du pôle Nord en mer du Groenland, en Hollande, en France, en Algérie, ou dans l’hémisphère Sud et jusqu’en Antarctique, pourvu qu’on soit sur le même méridien, il est toujours exactement la même heure (solaire) !

J’avais parlé, dans un billet précédent, de l’expérience toujours étrange consistant à passer de l’hiver à l’été en changeant d’hémisphère. Mais celle que j’ai faite cette semaine lors d’un court voyage d’à peine 700 km n’est pas moins intéressante. Les mêmes arbres qui sont ici, à Paris, tout resplendissants de leurs feuilles tendres et claires, fraîchement épanouies sous les cieux souriant du printemps, n’avaient, à Groningen, pas la moindre pousse verdâtre au bout de leurs branches dénudées ! Et puis, en redescendant plein Sud vers Paris, c’est comme si j’avais vu le printemps exploser dans les arbres, se déployer avec ivresse, comme on rit aux éclats, condensant des semaines d’épanouissement timide en quelques heures effervescentes.

Dès les abords de l’IJsselmeer, les premiers bourgeons forçaient le bois rigide encore accroché à l’hiver. Puis, faisant toujours route vers le Sud, j’ai pu voir ces bourgeons s’allonger et se multiplier, teintant de vert jaunâtre les branches à présent relâchées et confiantes. À Amsterdam, c’étaient déjà de petites feuilles qu’on voyait orner les mêmes arbres, et puis, de plus en plus, ces feuilles s’étiraient, s’affirmaient, s’offraient à la lumière. À Anvers, on comprit qu’il n’était plus question pour elles de rester repliées, engoncées dans leur gaine. Il fallait rayonner au grand jour ! Se révéler, comme des origamis que l’on ouvre…

À Bruxelles, le crépuscule était déjà bien avancé, mais les arbres donnaient à la lumière des réverbères la pleine mesure de leur franche gaieté. Arrivé à Paris, je ne pus qu’admettre l’évidence : la vivacité végétale, l’éclosion triomphante n’étaient plus même cette ardente rumeur s’égaillant dans les branches. Le printemps n’était plus cette fougue haletante : il était là ! Entériné.

Tout étourdi encore par cet accéléré où le temps s’emballa le long du méridien – comme si Dieu s’était endormi sur la manivelle du temps et que l’orgue de Barbarie qui joue la partition saisonnière de la Terre avait avalé à la hâte un surcroît de feuilles perforées – je vous adresse de printanières pensées.

Qu’éclosent dans le vent nos rêves de lumière !

ET

Miroirs et infini…

Sans doute vous êtes-vous déjà trouvé entre deux miroirs se faisant face – par exemple dans une cabine d’essayage de vêtements, ou en jouant avec les portes doubles ou triples d’un meuble de salle de bain, ou quelque chose de ce genre…

De reflet en reflet, on s’y voit un nombre incalculable de fois, jusqu’à l’infini. C’est vertigineux, fascinant, troublant. Mais très vite, on s’aperçoit qu’en fait on ne parvient pas à voir véritablement un nombre infini d’objet, ou de nous-mêmes [je parlais hier de Narcisse : cela l’eût rendu fou, mais heureusement pour lui, les Galeries Lafayette n’existaient pas encore, ni les clips des années 70, ni les émissions de Maritie et Gilbert Carpentier, si vous voyez ce que je veux dire… ;-)].

Parce que l’infini, ce n’est pas seulement beaucoup, ou inhabituellement beaucoup ! C’est intéressant, d’ailleurs, de comprendre que les adverbes « un peu », « beaucoup » ou « énormément » sont exactement aussi éloignés de l’infini l’un que l’autre, à savoir… infiniment ! Si la « distance » entre 500 et 2000 est 1500, alors la distance entre 3 et l’infini est la même qu’entre 20000 et l’infini, ou entre cent mille milliards de milliards de milliers de centaines et l’infini : c’est l’infini !

Bref, on a beau se contorsionner jusqu’au torticolis pour modifier l’apparence des reflets en cascade qui se répercutent dans les miroirs, il y a toujours cette dérive inexorable vers les bords, ou vers notre propre reflet qui les intercepte et met alors fin au processus de démultiplication. Et puis, la dérive des images reflétées ne s’effectue pas seulement dans une direction ou dans une autre, mais aussi vers des tailles de plus en plus petites. Chaque nouveau reflet est un peu plus petit que le précédent, ce qui n’est pas étonnant, d’ailleurs, puisque c’est le même objet que l’on voit chaque fois un peu plus loin derrière le miroir, dans la profondeur de l’espace des images. Ainsi, même s’il n’y avait pas de dérive latérale, la « fuite » vers le minuscule suffirait à nous empêcher de saisir un nombre infini de reflets.

Comment remédier à tout cela, pour percevoir vraiment l’infini ?

Hmm… Voyons voir…

Puisque les images dérivent, il y aurait bien une solution : augmenter la tailles des miroirs. Mais on aura beau la doubler, la décupler ou la multiplier par mille, on ne fera jamais que doubler, décupler ou multiplier par mille le nombre des images, ce qui nous laissera toujours aussi loin de l’infini ! Une seule solution : disposer de miroirs infinis !

Première moralité : pour accéder à l’infini, il faut… de l’infini !

Mais peut-être pouvons-nous en fait empêcher que les images ne dérivent. Pour cela, il faudrait qu’on soit bien en face d’elles, et non pas légèrement sur le côté. On peut en effet s’amuser, en regardant plus ou moins en biais, à faire fuir plus ou moins vite les reflets vers les bords (ou vers nous-mêmes). Mais pour qu’ils ne fuient plus du tout, il faudrait être vraiment « pile en face » ! Mais alors… on ferait écran à la lumière ! Venant du miroir de devant, elle ne pourrait plus atteindre celui de derrière pour former une nouvelle image, sans nous traverser le corps ! Or nous ne sommes pas transparents… Aargh ! Rien à faire : on ne peut éviter la dérive, et donc la limitation du nombre d’images ! On peut en voir un grand nombre, éventuellement un très très grand nombre, mais ce sera toujours infiniment loin d’un nombre infini !

Deuxième moralité : pour accéder à l’infini, il faut… disparaître soi-même ! (Ou devenir totalement transparent.)

Mais voyons l’autre problème. Comment éviter le rétrécissement progressif des images ? Hmm. Là, c’est fatal, puisque les images se forment toujours plus loin dans l’espace merveilleux d’Alice, la perspective ne peut manquer de les faire rétrécir. Si on veut en voir une infinité, il faut se préparer à observer l’infiniment petit, jusqu’à ce que le mot « petit » n’ait plus même de sens, le point « final » étant en fait de dimension nulle.

Troisième moralité : pour accéder à l’infini, il faut… percevoir le point !

D’accord, oublions ce problème. Disons que les images ne rétrécissent plus (ou qu’on parvient effectivement à voir des points), et qu’on est finalement transparent. Pour éviter la dérive, on tâche de regarder « bien dans l’axe ». Plus on se rapproche de la direction optimale du regard, perpendiculaire aux miroirs, moins la dérive des images vers les bords est rapide, et on en voit alors de plus en plus. Mais nous savons déjà que ce n’est pas suffisant : beaucoup, vraiment beaucoup, énormément, ce n’est pas l’infini. Ce qu’on veut, c’est éviter même la plus infime des dérives. Admettons qu’on y arrive. Mais alors, c’est évident, puisqu’il n’y a pas de dérive (ni de rétrécissement), toutes les images sont bien exactement l’une au-dessus de l’autre. A-t-on a gagné ? Pas du tout ! Car alors, il n’y a plus qu’une image !!! La superposition d’une image sur elle-même, autant de fois qu’on veut, n’altèrera jamais, par définition, l’image initiale…

Quatrième moralité : quand on accède à l’infini… il n’y a plus qu’un !

Mais au fait, on a dit qu’on était transparent, sinon bien sûr on ferait écran à la lumière, et puisqu’on veut être juste en face des miroirs, il n’y aurait plus de reflets multiples du tout. D’accord, mais si on est transparent, alors que voit-on ? Pour voir quelque chose, ne serait-ce que notre propre œil qui regarde bien en face les miroirs, il faut que la lumière s’arrête dessus ! Si elle passe à travers, à l’évidence, on ne peut rien voir ! C’est comme l’air : on ne le voit pas « lui », mais les choses derrières, qui doivent être au moins partiellement opaques ! Finalement, même avec les concessions ci-dessus, si on parvient au bout du compte à voir une infinité de reflets, ce seront les reflets de rien du tout, et on ne verra donc… rien du tout ! (Une infinité de fois, peut-être, mais toujours rien du tout !)

Cinquième moralité : qu’on on accède à l’infini… c’est vide !

Bon, on pourrait s’amuser encore longtemps avec les miroirs et l’infini. Par exemple, puisque la lumière se déplace à une vitesse très grande, mais pas infinie, chaque aller-retour entre les miroirs nécessaire à la formation de l’image suivante prend un peu de temps. Infime, certes, mais si on veut vraiment un nombre infini d’images, il faudra un temps infini !

Mais sans doute vaut-il mieux faire comme les miroirs : au bout d’un moment, arrêter de réfléchir ! 😉

On s’en tiendra donc à nos cinq moralités :

L’infini, c’est l’infini !
L’infini, c’est notre effacement !
L’infini, c’est le point !
L’infini, c’est l’un !
L’infini, c’est le vide !

Et alors ? Où est-ce que je voulais en venir ? Oh, moi, nulle part !
Au départ, je voulais juste vous montrer cette étonnante photo, prise lundi dernier en gare de Groningen :

Cherchez le miroir...

Et puis, je me suis laissé prendre dans le miroir… 😉

Infiniment vôtre,

ET

Bon courage, Ségolène Royal !

Un petit clin d’œil, pour l’anecdote…

De retour de Groningen, j’ai fait ce soir une rencontre inattendue – et, pourrait-on dire, d’actualité – en descendant du train Thalys Amsterdam/Paris. Sans doute montée à Bruxelles (encore que ce ne soit qu’une supposition), Ségolène Royal avait manifestement voyagé dans le même train. En l’apercevant, juste à côté, je fus surtout frappé par sa très belle énergie, sa présence aimable et gracieuse, en un mot, son affabilité. C’est d’ailleurs ainsi que je l’ai remarquée, répondant à sa grâce par un sourire reconnaissant, pour ne m’apercevoir que plus tard qu’il s’agissait en fait de celle que les français semblent aujourd’hui préférer pour assumer la fonction présidentielle à partir de 2007.

Je m’éloigne, bien sûr, et puis, pensant aux attaques assez primaires (tiens, un amusant jeu de mot 😉 !) dont elle fait l’objet, tout particulièrement ces jours-ci, je me dis qu’il serait civil de lui signifier ouvertement ma sympathie de principe. Revenant légèrement sur mes pas, je lui adresse alors : « Permettez-moi de vous souhaiter bon courage ». À quoi elle répond un remerciement courtois d’un grand naturel et d’une grande simplicité, qui me confirme d’ailleurs ma première impression.

Au moment de m’éloigner à nouveau, je réalise que je tiens dans la main quelques fleurs, cueillies la veille dans un champ près de Groningen. J’en saisis alors une et la lui tends.

Voilà.

Bon, après coup, on peut développer un peu l’anecdote. Peut-être y a-t-il parmi vous des adeptes du langage des fleurs qui s’interrogeront sur l’espèce de celle-ci. Aie. En fait, il s’agissait d’un narcisse. Bah oui, pourquoi pas ? C’est très beau, un narcisse !

Je ne sais comment l’interpréter, bien sûr. Pour autant que j’aie pu le découvrir sur Internet, le narcisse serait symbole d’égoïsme, mais aussi de « beauté triomphante et cruelle de la jeunesse ».

Bon… Ça ne dit toujours pas grand chose, en fait. Peut-être ce symbolisme concerne-t-il plus celui qui offre la fleur que celui qui la reçoit. Ou bien peut-être concerne-t-il simplement une situation présente, générale, à conjurer plutôt qu’à s’approprier.
Bref, vous en penserez ce que vous voudrez, mais je retiens la délicatesse aimable de Ségolène Royal. Et pour ce qui est des narcisses, voici quand même ceux que j’ai gardés : 😉

Narcisses de Groningen

C’est étonnant, cette variété, non ? Le calice et la corolle sont soit de même couleur, soit de couleurs différentes, jaune, orangé, blanc, voire dégradé jaune-orange. Intéressant. Et par ailleurs, ça sent très bon !

Et si on réhabilitait les narcisses ? Disons qu’ils ne symbolisent plus l’égoïsme, mais son rejet et sa défaite ! Après tout, Narcisse est certes le jeune berger de la mythologie grecque qui fut épris de son propre reflet, mais c’est justement lorsqu’il eût cessé de vivre que poussa miraculeusement au lieu où il mourut cette fleur délicate qui porte aujourd’hui son nom !

Qu’on me permette alors de souhaiter à Ségolène Royale que ce narcisse printanier soit entre ses mains la conjuration du « chacun pour soi » qui règne trop souvent, il faut bien le dire, dans les cercles et les ellipses de la politique…

Fleurs du monde, unissez-vous !

ET