Méditerranée

Si particulière est la caresse de cette mer miraculeuse, d’où l’esprit le plus pénétrant et l’âme la plus subtile n’ont cessé de souffler de concert depuis tant de siècles et de millénaires, que les terres qui la bordent et l’accueillent en leur écrin minéral, végétal et spirituel se sont hissées ensemble à cette qualité unique de lumière et de cœur qui les conjoint dans la douceur et la beauté, pour enfin les unir dans la grâce…

Plus encore que par la limpidité de ses flots et la magnificence de son intégrité marine, cette mer au milieu des terres, cette « méditerranée » à l’onde exaltée par la splendeur des cieux qu’elle reflète, est grande par le souffle des esprits qui l’animent et s’y animent, par l’aménité de la terre qui s’y offre aux Hommes et l’humilité des Hommes qui servent la terre en retour avec amour et gratitude.

Ayant eu la chance de marcher le long de ces rivages en diverses contrées du pourtour méditerranéen, et plus encore à « l’intérieur des terres » (comme on dit parfois, sans se douter que le mot intérieur peut se charger ici des résonances les plus intimes), je fus frappé maintes fois par l’unité des paysages qui s’y déploient. De la découpe des roches argentées, timidement affleurantes, à la sérénité agraire de sols riches ou rocailleux, tout indique la similitude des formes et la fraternité secrète des lieux, et c’est comme si les arbres par leurs vivantes racines, les insectes par leurs stridulations nocturnes, les fleurs et les plantes par leurs parfums diffus et vagabonds, ne cessaient de communiquer, de communier même, d’un bord à l’autre de ce vaste berceau d’humanité.

Andalousie, Provence, Corse, Toscane, Sicile, Grèce égéenne, Galilée, basse Égypte, Maghreb…

Un même souffle, une harmonie, une communauté à découvrir, à rêver, à construire ou à reconstruire…

Et peut-être l’olivier comme emblème ? Ou comme une prière…

Voici des oliviers admirés en Sicile il y a six semaines (cliquer pour agrandir) :

en Provence, dans les Alpilles, il y a deux jours 😉 :

au pied de Jérusalem et du mont des oliviers, dans le jardin de Gethsémani, il y a un an :


Ces derniers sont un peu différents d’aspect, certes, mais il faut sans doute préciser qu’ils ont rien moins que deux mille ans ! Le nom « Gethsémani », c’est-à-dire « le pressoir à huile », en araméen, rappelle l’usage millénaire des olives dans la région. Jésus, qui semble-t-il affectionnait tout particulièrement ce lieu, aurait observé les premières floraisons de ces arbres mêmes…

Unité, donc, de cette terre faite jardin par le travail et l’attention des Hommes. Les mêmes jasmins embaument les rues de Taormina ou du Caire, les bougainvilliers fleurissent tout pareillement à Florence ou à Tel-Aviv, et les émanations aromatiques de cette lavande et de ce romarin que je laisserai ce soir infuser dans ma tisane provençale sont identiques à celles dont je me délectais l’an dernier sur le mont Carmel à Haïfa. C’est là, sur le campus du Technion Institute, qu’en cette nuit de Lune blonde où leur présence quasi mystique faisait de tout l’espace un temple, les pins d’ombre et d’azur, enracinés dans leur absolu même, me sont apparus, suspendus dans le silence, dans la Grâce angélique de leur universalité. [Merci, Arnon, pour cette invitation magique et providentielle…]

Bien sûr, les conflits et les dissonances humaines n’ont jamais épargné les rivages de la Méditerranée – preuve sans doute que son aura sacrée n’en encore qu’une promesse, un rêve à achever… Mais la nature apprivoisée, travaillée dans la tendresse et l’humilité, a tant été bénie par les Hommes et leurs Dieux qu’elle peut à présent les bénir en retour, et faire vivre l’espoir d’une vaste communauté, philosophe et mystique, fraternelle et sensible, gracieuse et apaisée, en un seul mot : humaine !

ET

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